« Chers amis de Please Bring Me My Wine,
Je présente depuis longtemps la météo sur une grande chaîne de la télévision française et j’aimerais bien comprendre le lien entre climat et le petit Brouilly que je bois avec ma terrine de lapin. Pourriez-vous m’aider à y voir plus clair ?
Evelyne D. »
Chère Evelyne,
Oui, nous allons t’aider. Tu nous as bien aidés pendant 30 ans à choisir si on sortait ou pas le parapluie, ce n’est qu’un juste retour des choses.
Bon, vaste sujet que celui du climat.
Tout d’abord il faut savoir que la vigne n’est pas adaptée à tous les climats : la vigne, si on veut que ça produise du bon vin il ne faut pas la planter n’importe où.
Il ne faut pas qu’il fasse trop froid (genre ça) :
Tu as déjà essayé de récolter des grappes de raisin avec des griffes de 4 cm ?
Ou trop chaud (comme ça):
Mince, J’étais pourtant sûr d’avoir garé ma caravane juste après cette dune…
Pour obtenir une bonne maturation des raisins, une température moyenne annuelle située entre 16° et 21°, une pluviométrie assez faible (pour éviter d’avoir des récoltes dilués avec peu de concentration et du vin pas top à la sortie) et un ensoleillement minimum sont nécessaires
Grosso modo, on retrouve ces conditions idéales entre 30° et 50° de latitude Nord et Sud.
Et oh surprise, on trouve sous ces latitudes -au Nord- la plupart des vins du Vieux Monde : France, Italie, Espagne, Allemagne,… et sous les latitudes Sud ceux du Nouveau Monde : Afrique du Sud, Nouvelle-Zélande, Australie, Chili, Argentine…
How bizarre! Comme dirait nos amis néo-zélandais d’OMC.
On va donc retrouver trois types de climats propices à la culture du vin :
- Climat continental : différence de températures importante entre été et hiver. Ex : la Champagne, Mendoza en Argentine.
- Climat océanique : différence faible de températures entre été et hiver. Précipitations étalées tout au long de l’année. Ex : Bordeaux, Auckland en NZ.
- Climat méditerranéen : différence faible de température entre été et hiver (mais été chaud et hiver doux). Précipitations concentrées en automne. Ex : Carneros aux USA, Châteauneuf-du-Pape.
Au-delà de ces considérations viticoles, quels sont les impacts du climat sur le vin que je vais avoir dans mon verre ?
Et bien le raisonnement est simple : qui dit plus de chaleur dit plus de maturité (pour le raisin hein, rien à voir avec les cougars), dit plus de sucre dans le jus avant sa vinification. On a donc :
- Climat chaud : plus d’alcool, plus de corps, plus de tannin, moins d’acidité. Les arômes que l’on peut distinguer dans les vins de climat chaud sont ceux des fruits compotés et/ou exotiques.
- Climat frais : moins d’alcool, moins de corps, moins de tannin, plus d’acidité. Les arômes que l’on retrouvera à la dégustation seront des arômes de fruits frais (framboise, cerise fraîche, citron, pomme verte,…).
- Climat tempéré : entre les deux (la réponse du Normand).
L’idéal -pour voir l’influence du climat sur le vin – va être de goûter des vins dont les cépages s’expriment bien sur différents types de climat. Prenons l’exemple du Chardonnay pour les vins blancs et du Pinot Noir pour le vin rouge :
- Un chardonnay qui a été élevé à Chablis (climat continental frais) va être caractérisé par une acidité marquée, un degré d’alcool assez faible et des arômes d’agrumes et de fruits verts.
- Pour un chardonnay qui a été fait à Auckland (climat continental chaud) on retrouvera une acidité moyenne, plus de corps et des arômes de fruits exotiques et fruits à noyaux.
- Un Pinot Noir de Bourgogne (climat continental frais) aura une acidité forte, assez peu de tanin et d’alcool et des arômes végétaux et de fruits rouges frais (la cerise revient souvent au nez et en bouche).
- Le même Pinot Noir fait dans la Napa Valley aux USA (climat méditerranéen chaud) présentera une acidité moyenne, des tannins plus présents mais sous contrôle – on parle de Pinot Noir quand même ! – et un degré alcoolique plus élevé. Côté arômes, c’est la fête de la compote de fruits rouges, du tabac, du bois (cèdre) et de l’animal (cuir).
Voilà voilà Evelyne, j’espère que les choses sont un peu plus claires pour toi maintenant.
On s’appesantira plus longuement la prochaine fois sur les facteurs qui permettent de nuancer température (altitude, courant océanique, exposition), l’ensoleillement (présence de mers et lacs, latitude,…) et l’eau disponible pour les vignes (notamment grâce à l’irrigation).
Tout un programme.
Allez bon Brouilly et vive la météo!
Un blog post de Franck Gestin